La Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) vient d'indiquer avoir détecté "six fois plus de fraudes et abus" en 2006 qu'en 2005, pour un montant total de 120 millions d'euros, sous l'effet d'un meilleur contrôle
"Nous ciblons mieux, nous détectons mieux les fraudes et abus", s'est félicité le directeur du contrôle-contentieux et de la répression des fraudes à l'assurance maladie, le Dr Pierre Fender, au cours d'une conférence de presse.
Selon lui, l'assurance maladie a détecté "six fois plus de fraudes et abus en 2006 qu'en 2005, pour un montant total de 120 millions d'euros". Cette somme, à mettre toutefois en parallèle avec les plus de 140 milliards d'euros qui transitent en un an dans les caisses de la "sécu", correspondrait "au coût de 91 appareils IRM ou au coût de fonctionnement annuel de quatre hôpitaux publics moyens", a-t-il souligné.
L'an dernier, 143 personnes ont été condamnées à des peines de prison ferme ou avec sursis pour avoir escroqué l'assurance maladie.
Chez les praticiens, 351 interdictions de donner des soins allant de un mois à plus d'un an ont été prononcées par les Ordres médicaux.
Ces fraudes concernent notamment la présentation de faux bulletins de salaires pour toucher des indemnités journalières, de fausses ordonnances afin de revendre des médicaments au marché noir, ou encore la facturation d'actes fictifs par des médecins.
Des contrôles plus ciblés sur la chirurgie esthétique ont, à eux seuls, permis des économies d'un montant de 4,7 millions d'euros, des patients tentant de faire prendre en charge par la Sécurité sociale des actes de chirurgie esthétique comme s'il s'agissait d'actes de chirurgie plastique réparatrice.
L'assurance maladie compte élargir, d'ici fin 2007, ses contrôles à l'activité des établissements de santé et cibler les assurés bénéficiaires de chirurgie esthétique réalisée hors de France "sous couvert de chirurgie aiguë inopinée telle qu'une appendicectomie".
Concernant les fraudes sur les produits de substitution comme le Subutex, M. Fender a estimé l'ampleur du préjudice pour l'assurance maladie à un montant compris entre 4 et 10 millions d'euros.
Plus généralement, le directeur de la caisse nationale d'assurance maladie, Frédéric van Roekeghem, a annoncé un nouveau renforcement des contrôles, notamment sur les arrêts de travail de longue durée, qui seront systématiquement contrôlés à partir de 45 jours et non plus de 60 jours. Les prescriptions de transports sanitaires sont également dans le collimateur
Les dépenses de santé remboursées par la Sécurité sociale pourraient augmenter de 50% d'ici 2015 du fait du développement des affections longue durée, des progrès médicaux et du vieillissement de la population, selon une projection présentée aussi aujourd'hui par l'assurance maladie.
Il y a eu un +Livre blanc+ sur les retraites en 1991 mais nous n'avions jamais établi de projection sur la soutenabilité financière en matière de santé", a relevé le directeur de l'assurance maladie, Frédéric van Roekeghem, lors de la présentation de cette étude.
Au lendemain de l'annonce d'un nouveau dérapage du déficit de la Sécurité sociale, qui s'élèverait en 2007 à 12 milliards d'euros (toutes branches confondues: maladie, vieillesse, famille), cette étude prospective vient montrer, selon M. van Roekeghem, la nécessité "d'accélérer les réformes structurelles pour contrecarrer" la dégradation des comptes. Voir le plan de redressement des comptes proposé par le Gouvernement.
"Si l'on projette les dépenses d'assurance maladie à l'horizon 2015, sur la base des tendances observées sur la période 1998-2004, on estime qu'elles devraient atteindre 210 milliards d'euros contre 140 milliards actuellement, ce qui correspond à une hausse de 50%", explique l'assurance maladie.
Le total des dépenses de santé (remboursées ou non) est actuellement de 190 milliards d'euros.
Depuis 1979, les dépenses de santé remboursées ont augmenté de 3,4% par an, soit 1,3 point de plus que la progression annuelle (+2,1%) du Produit intérieur brut (PIB).
Seules les quatre réformes de l'assurance maladie menées depuis la fin des années 70 (réformes Séguin de 1986, Veil en 1994, Juppé Ordonnances 96-344, 345 et 346 de 1996 et Douste-Blazy loi 2004-810) ont permis de réduire temporairement la hausse des dépenses au niveau de l'évolution du PIB, voire à un niveau inférieur.
Entre 2005 et 2015, le rythme d'évolution des dépenses maladie est évalué par l'assurance maladie à +5,3% par an. Les soins de ville (médecine libérale, médicaments etc.) devraient atteindre plus de 100 milliards d'euros, contre 63 milliards d'euros en 2005, et l'hospitalisation autour de 105 milliards d'euros.
Cette évolution est pour partie liée au vieillissement de la population et aux progrès médicaux.
L'assurance maladie pointe du doigt le développement des dépenses liées aux affections de longue durée (ALD, comme le cancer, le sida, le diabète ou Alzheimer), prises en charge à 100% et dont sont atteints environ 7,4 millions de personnes.
Quelque 70% des montants de remboursement devraient être concentrés sur les ALD en 2015, contre 60% actuellement. A elle seule, la croissance des dépenses d'ALD représenterait 80% de la hausse des dépenses, principalement en médicaments et hospitalisation.
"En France, nous avons des débats sur le périmètre de prise en charge, comme actuellement sur les franchises médicales, ou le financement, avec par exemple la TVA sociale, mais nous n'en avons pas sur l'optimisation des dépenses", a déploré directeur de la caisse nationale d'assurance maladie, Frédéric van Roekeghem.
L'assurance maladie compte ainsi miser dans les années qui viennent sur la prévention de l'aggravation des maladies chroniques telles que le diabète, l'hypertension artérielle ou l'asthme en généralisant les dépistages de cancer ou en développant le rôle préventif du médecin traitant.
Le développement de la chirurgie ambulatoire, qui limite au maximum la durée de séjour du patient à l'hôpital, est une autre piste, prônée par le gouvernement, afin de "limiter les coûts et diminuer les risques d'infections nosocomiales"