Deux ans après avoir subi une greffe du triangle nez-lèvres-menton, Isabelle Dinoire s'"habitue" à ce nouveau visage mais ne le reconnaît pas comme sien: "ce visage ... Ce n'est pas moi. Ce ne sera jamais moi", déclare-t-elle au quotidien Le Monde daté d'aujourd'hui.
"On a beau essayer de me convaincre que que je ne suis pas si différente d'avant, je suis la mieux placée pour juger!", proteste-t-elle.
"Et la réponse est: si, très différente! Une partie de moi et de mon identité a disparu à jamais. Et je garde précieusement en moi le souvenir de ce que j'étais", raconte-t-elle à la journaliste du Monde, Annick Cojean.
C'est, selon la journaliste du Monde, "une jeune femme coquette dont l'état général progresse chaque jour".
La photo publiée par Le Monde date de février 2006, lors de l'unique conférence de presse avec Isabelle Dinoire, mais le quotidien décrit "un visage à l'ovale harmonieux" et une femme "à la diction presque parfaite".
"Je suis revenue sur la planète des humains. Ceux qui ont un visage, un sourire, des expressions faciales qui leur permettent de communiquer. Et je revis", raconte Isabelle Dinoire qui avait reçu le 27 novembre 2005, à l'âge de 38 ans, la première greffe du triangle nez-lèvres-menton, réalisée par le Pr. Bernard Devauchelle du CHU d'Amiens et le Pr Jean-Michel Dubernard du CHU de Lyon.
La jeune femme avait été défigurée par son chien, "pendant la nuit", alors qu'elle "était assommée de somnifères", selon son témoignage.
Lorsque l'équipe médicale lui propose une greffe, elle dit "oui. Tout de suite", car "c'est quoi une vie sans visage?", interroge-t-elle.
Dix-huit mois plus tard, elle témoigne de sa gratitude à la famille de la donneuse et aux équipes médicales qui continuent de la suivre étroitement, compte tenu du risque permanent de rejet du greffon.
Isabelle Dinoire estime que "chacun devrait réfléchir aux dons d'organes", car "une personne peut en aider cinq autres à vivre après elle", et appelle à en parler en famille.
Elle précise que ses "rapports avec les journalistes sont les seules déconvenues de toute cette aventure", que sa famille "a été harcelée de façon hallucinante".
Elle a accordé cet entretien exceptionnel à la fois pour remercier les équipes médicales et pour "les patients dont la vie ne tient qu'au fil de la greffe", selon Annick Cojean.
Mais elle "voudrait ensuite se fondre dans la foule des greffés sans histoire. Et qu'on la laisse en paix".
Voir le colloque relatif à la greffe de tissus composites de la face réalisée par les Prs Devauchelle et Dubernard et la greffe réalisée par le Pr Lantiéri.