Un nouveau dispositif lancé par la Caisse Nationale de l'Assurance maladie(CNAM), expérimental depuis quelques mois dans 4 départements (Yvelines, Seine-Saint-Denis, val d'Oise et Alpes Maritimes), vient d'être généralisé après accord de la Commission nationale Informatique et Libertés le 10 juillet dernier : il permet aux praticiens d'accéder à l'historique des remboursements des patients sur douze mois via une plateforme Web médecin (le décret 2006-143 du 9 février 2006 relatif aux modalités d'accès des médecins aux données relatives aux prestations servies aux bénéficiaires de l'assurance maladie a instauré ce mécanisme).
Un thésaurus d'aide à la prescription émis par l'AFSSAPS existe déjà contre les interactions médicamenteuses.
Pour consulter Web Médecin, les praticiens doivent disposer de leur carte professionnelle CPS et de la carte Vitale de leurs patients. Seules les informations relatives aux remboursements y figurent.
Une lacune apparait relativement rapidement: ce système ne révèle ni les résultats des examens, ni les comptes rendus de consultations et d'hospitalisations; objet du Dossier Médical personnel (DMP) en cours de développement et ralenti par une opposition de la même CNIL sur le codage (notamment pour que les patients puissent "flouer" certaines informations au praticien qu'ils consultent)
Le Conseil national de l'Ordre des médecins (CNOM) réserve un accueil mitigé à ce nouvel outil. Ils regrettent un manque de confidentialité dans la mesure où ils ont accès à toutes les informations. « Il est problable qu'un patient en consultation chez un dermatologue n'ait pas forcément envie que ce dernier soit informé qu'il prend une trithérapie ou un traitement psychotrope », souligne le docteur André Deseur, vice-président de la branche exercice professionnel du Conseil national de l'Ordre des médecins.
Pour l'assurance maladie, « ce système a été conçu pour permettre une meilleure prise en charge des patients par le médecin : en évitant, par exemple, les interactions médicamenteuses. Et de cette manière, un praticien occasionnel peut prendre connaissance de l'historique du patient», précise un porte-parole de la CNAM. Cependant, le but du DMP est exactement le même avec en plus, l'absence de redondance d'un acte médical (prescription médicamenteuse, imagerie ...)
Le docteur André Deseur affirme quant à lui :« Quand on suspecte un effet latéral produit par un médicament, on pose la question directement au patient. On peut aussi s'interroger sur le temps nécessaire à la connexion [au site Web Médecin] et à celui passé en ligne à piocher parmi une liste chronologique de remboursements. Et si l'outil n'est pas utilisé, pourra-t-on nous en tenir rigueur ? »
La CNAM tente de rassurer les patients.« Chacun peut refuser l'accès à l'historique de ses dépenses de santé et cette décision n'influera en rien sur les remboursements. »
La CNIL a émis une recommandation :« L'information des assurés est primordiale dans la mesure où ils remettent leur carte Vitale pour la télétransmission. Il faut que le médecin différencie les deux opérations, la consultation de l'historique et les remboursements, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur ce que le patient l'autorise à faire », précise Sophie Vulliet-Tavernier, directeur des affaires juridiques à la Cnil. Le médecin aura-t-il le temps?
Au niveau de la sécurité, les garanties présentées par l'assurance maladie sont apparues suffisantes à la CNIL :« Les informations ne sont accessibles que grâce à la carte CPS du professionnel et ses codes d'identification. Les données sont cryptées. Tout comme la communication entre le portail permettant d'accéder au Web Medecin et les serveurs des organismes complémentaires. » Mais la CNIL recommande tout de même l'utilisation d'un antivirus et d'un pare-feu, afin de réduire les risques d'intrusion sur l'ordinateur du médecin, inconvénient qui ne pourra exister avec le DMP dont les données sont ultra sécurisées.
Selon l'assurance maladie, 3 000 médecins se sont inscrits pour avoir accès à ce dispositif. Elle espère dès le mois de novembre en compter 20 000. Les praticiens doivent obligatoirement posséder une connexion haut débit sans laquelle ils ne pourront accéder au portail Web Médecin, ce qui est le cas dans les régions expérimentales mais pas obligatoirement dans toutes les villes de France. Certains praticiens - rares - ne sont même pas équipés d'ordinateur. Existera-t-il une différence de traitement selon que l'on consulte en mileu rural ou urbain?
Comment vont se conjuger ce dossier et le DMP?
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