Ce dispositif, mis en oeuvre pour une durée de cinq ans, était assujetti à certaines conditions d’appariement donneur-receveur en fonction du statut viral du donneur sous forme de protocole.
En France, comme dans les autres Etats européens, la pénurie d’organes est un phénomène patent qui s’aggrave régulièrement depuis plusieurs années. Les délais d’attente s’allongent (médiane d’attente = 19,8 mois pour la greffe rénale) et 434 patients sont décédés en attente d’un greffon (données 2009, source Agence de la biomédecine).
Le dispositif dérogatoire mis en oeuvre en janvier 2006 a permis, en moins de trois ans, la réalisation de 617 greffes d’organes supplémentaires, dont 366 greffes rénales, à partir de 293 donneurs en mort encéphalique ou vivants. Ces chiffres représentent 6 % environ de l’activité totale de greffe d’organes et ont permis de sauver la vie de nombreux patients dont le pronostic vital était engagé. De plus, le dispositif a également permis la réalisation de 61 greffes de cellules souches hématopoïétiques réalisées chez des patients dont le pronostic vital était engagé à court terme.
Par ailleurs, bien qu’aucun cas de transmission du VHB chez des receveurs ayant bénéficié d’une greffe de rein, coeur ou poumon ait été observé, des séroconversions chez des receveurs de foie sont survenues." et pour ceux atteints du VHC "Des dérogations permettant le recours à des donneurs présentant un risque infectieux pour le receveur vis-à-vis du virus de l’hépatite C (VHC) existaient depuis 1997, pour la greffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH) issues de la moelle osseuse dans les situations d’urgence vitale et depuis 2005, pour les greffes de coeur, foie, poumon et reins ainsi que pour les greffes de CSH quelle que soit leur origine (sang périphérique, sang placentaire ou issues de la moelle osseuse) et de cellules mononucléées, dans les situations engageant le pronostic vital et en l’absence d’alternatives thérapeutiques appropriées. Cette dernière situation a fait l’objet d’un encadrement réglementaire aboutissant à la mise en place de recommandations contenant des protocoles, élaborés par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) sur la base de l’avis d’un groupe d’experts multidisciplinaires, publiés au Journal officiel de la République française du 11 mars 2006.
Aux termes des quatre années suivant la mise en place de ces protocoles, l’AFSSAPS a remis au ministre chargé de la santé un rapport d’évaluation des greffes réalisées dans ce cadre afin que celui-ci apprécie s’il convenait de prolonger le dispositif au-delà du 22 décembre 2010. Le retour d’expérience sur ces dérogations a mis en évidence la nécessité de maintenir le dispositif des protocoles pour le VHC.
La poursuite de ce type de greffes dérogatoires a été préconisée au vu, d’une part, de la prévalence du VHC dans la population générale et de la pénurie de donneurs et, d’autre part, du caractère potentiellement intrafamilial de la contamination à VHC pour les dons en situation apparentée. Dans tous les cas, le patient doit être préalablement informé et doit donner son consentement sur la possibilité de recevoir un greffon porteur de marqueur(s) viraux. Il doit également bénéficier d’une prise en charge thérapeutique et d’un suivi postgreffe appropriés.
Pour permettre l’accès à ces protocoles, un dispositif réglementaire est mis en place pendant cinq ans en vue de procéder à l’évaluation de ces greffes dérogatoires, par le biais d’un suivi national des receveurs."
DECRET
Décret n° 2010-1625 du 23 décembre 2010 relatif aux règles de sécurité sanitaire portant sur le prélèvement et l'utilisation des éléments et produits du corps humain
NOR: ETSP1027652D
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre du travail, de l'emploi et de la santé,
Vu le code de la santé publique, notamment ses articles L. 1111-2 et L. 1211-6 ;
Le Conseil d'Etat (section sociale) entendu,
Décrète :
1° L'article R. 1211-14 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art.R. 1211-14.-La sélection clinique du donneur mentionnée à l'article R. 1211-13 est complétée pour tout prélèvement ou collecte d'éléments et produits du corps humain à des fins thérapeutiques par des analyses de biologie médicale destinées à faire le diagnostic de certaines maladies infectieuses transmissibles. En cas de diagnostic positif, la greffe ou l'utilisation à des fins thérapeutiques des produits du corps humain est interdite.
« La liste des maladies infectieuses mentionnées à l'alinéa précédent est fixée par un arrêté du ministre chargé de la santé. Cet arrêté énonce également les cas dans lesquels le médecin peut, dans l'intérêt du receveur, procéder à la greffe ou à l'utilisation à des fins thérapeutiques des produits du corps humain en dépit de la présence de certains marqueurs infectieux révélés par les analyses de biologie médicale, si le risque prévisible encouru par le receveur en l'état des connaissances scientifiques n'est pas hors de proportion avec le bénéfice escompté.
« Le médecin peut procéder à la greffe d'organes lorsque le résultat de l'analyse mentionnée au 3° de l'article R. 1211-17 n'a pu être obtenu dans les délais compatibles avec la réalisation de la greffe.
« La délivrance de l'information au receveur est effectuée dans le respect de bonnes pratiques édictées dans les conditions fixées par le sixième alinéa de l'article L. 1111-2.
« Lorsque le don n'est pas anonyme, le médecin qui prend en charge le donneur l'informe que la présence de marqueurs infectieux dans les résultats des analyses de biologie médicale auxquelles il s'est soumis sera nécessairement connue du receveur. » ;
2° L'article R. 1211-17 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art.R. 1211-17.-Un arrêté du ministre chargé de la santé fixe :
« 1° La nature et les conditions de réalisation des analyses de biologie médicale pour la recherche des marqueurs d'infection ;
« 2° Lorsque cela est techniquement possible, la nature et les conditions de réalisation des analyses de biologie médicale pour la recherche des marqueurs d'infectivité ;
« 3° La nature de l'analyse consistant à rechercher le génome du virus ;
« 4° Les modalités d'exploitation des résultats des analyses définies par le présent article. »
3° L'article R. 1211-21 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art.R. 1211-21.-Le médecin peut déroger à l'interdiction mentionnée au premier alinéa de l'article R. 1211-14 lorsqu'en dépit du risque de transmission d'un virus par le donneur les alternatives thérapeutiques à la greffe ou à l'utilisation à des fins thérapeutiques de produits du corps humain sont inappropriées et que le pronostic vital est engagé.
« Un arrêté du ministre chargé de la santé précise les cas dans lesquels, malgré le risque de transmission d'un virus par le donneur, la greffe ou l'utilisation à des fins thérapeutiques de produits du corps humain peut avoir lieu dans l'intérêt du receveur conformément au premier alinéa de l'article L. 1211-6, ainsi que les organes et les cellules concernés.
« La greffe ou l'utilisation à des fins thérapeutiques de produits du corps humain mentionnée au premier alinéa du présent article est effectuée dans le respect des protocoles édictés par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l'Agence de la biomédecine et de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. Ces protocoles incluent les modalités de mise en œuvre de ces greffes et notamment des recommandations de suivi thérapeutique adapté. » ;
4° Après l'article R. 1211-21, il est ajouté un article R. 1211-22 ainsi rédigé :
« Art.R. 1211-22.-Dans les situations d'urgence vitale et en l'absence d'alternatives thérapeutiques, le médecin peut également déroger à l'interdiction mentionnée au premier alinéa de l'article R. 1211-14.
« Un arrêté du ministre chargé de la santé précise les cas dans lesquels, malgré le risque de transmission d'un virus par le donneur, la greffe ou l'utilisation à des fins thérapeutiques de produits du corps humain peut avoir lieu dans l'intérêt du receveur conformément au premier alinéa de l'article L. 1211-6, ainsi que les organes et les cellules concernés.
« La greffe ou l'utilisation à des fins thérapeutiques de produits du corps humain mentionnée au premier alinéa du présent article est effectuée dans le respect des protocoles édictés par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l'Agence de la biomédecine et de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. Ces recommandations incluent les modalités de mise en œuvre de ces greffes et notamment de suivi thérapeutique adapté. »
Dans un délai de quatre ans à compter de la date de la publication du présent décret, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé remet au ministre chargé de la santé un rapport d'évaluation des greffes réalisées en application de l'article R. 1211-21 du code de la santé publique au regard du risque de transmission du virus de l'hépatite C. Ce rapport est élaboré au vu d'une évaluation effectuée par l'Agence de la biomédecine.
Fait à Paris, le 23 décembre 2010.
François Fillon
Par le Premier ministre :
Le ministre du travail, de l'emploi et de la santé,
Xavier Bertrand