Le 28 novembre 2010, le benfluorex voyait son AMM retirée suite à une suspension prononcée le 30 novembre 2009 et un SMR jugé insuffisant en 1999.
Avec le scandale du médiator - commercialisé depuis le 1er septembre 1976 (AMM le 16 juillet 1974), Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé, et Nora Berra, secrétaire d'Etat chargée de la santé, ont confiés une mission d'enquête à l'IGAS le 29 novembre 2010.
Anne-Carole BENSADON, Etienne MARIE et Aquilino MORELLE, membres de l'IGAS, ont remis leur conclusions de 260 pages sur « la reconstitution de la succession des évènements et des choix concernant ce médicament afin d'analyser les mécanismes de prise de décisions en prenant en compte les éléments issu de la pharmacovigilance, l'évolution des connaissances scientifiques, les décisions intervenues dans d'autres pays et les conditions d'utilisation de ce médicament compte tenu du cadre défini par l'autorisation de mise sur la marché » ce samedi 15 janvier 2011 après six semaines de travail, une centaine d’auditions menées et l’exploitation des dossiers scientifiques et administratifs s’échelonnant sur 40 années.
Le rapport définitif est attendu pour le 31 mars 2011 incluant cette fois-ci « un constat de l'organisation et du fonctionnement de la pharmacovigilance en France et la présentation des principales mesures permettant d'améliorer ce dispositif et la proposition de dispositif permettant de favoriser la notification spontanée des effets indésirables, leur recueil et leur évaluation et la capacité des pouvoirs publics à piloter des études post-AMM. »
La synthèse fait apparaître les responsabilités suivantes:
« *les laboratoires Servier qui dès l’origine du médicament ont poursuivi un positionnement du MEDIATOR® en décalage avec sa réalité pharmacologique (1) ;
*l’Agence chargée du médicament, inexplicablement tolérante à l’égard d’un médicament sans efficacité thérapeutique réelle (2) ;
*le système de pharmacovigilance, incapable d’analyser les graves risques apparus en termes de cardiotoxicité du MEDIATOR® (3) ;
*enfin, les ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé gérant avec lenteur les déremboursements de médicaments à service médical rendu insuffisant, aboutissant dans le cas du MEDIATOR® à des résultats inverses de ceux recherchés (4). »
Le rapport indique également entre autres :
« Le déroulement des événements relatés dans ce rapport est très largement lié au comportement et à la stratégie des laboratoires Servier qui, pendant 35 ans, sont intervenus sans relâche auprès des acteurs de la chaîne du médicament pour pouvoir poursuivre la commercialisation du MEDIATOR® et pour en obtenir la reconnaissance en qualité de médicament anti-diabétique. »
« A aucun moment pendant cette longue période, aucun des médecins experts pharmacologues, internes ou externes à l’Agence [du médicament], n’a été en mesure de conduire un raisonnement pharmacologique clairvoyant et d’éclairer ainsi les choix des directions générales successives »
« La multiplicité des instances sanitaires chargées du médicament, leur cloisonnement et la complexité de leur fonctionnement rendent le système lent, peu réactif et contribuent à une dilution des responsabilités »
Le rapport pointe pour l'Agence les « liens d’intérêts financiers ou d’autres natures tels qu’ils devraient être signalés à l’Agence, ce qui n’est pas à l’heure actuelle systématiquement le cas » en prenant l'exemple de « la présence encore aujourd’hui d’un représentant institutionnel du LEEM (Les entreprises du médicament) dans les commissions, et parfois les groupes de travail, parait inacceptable. »
Après avoir passé en analyse les responsabilités, la mission de l'IGAS indique elle-même espérer « pouvoir contribuer à la mise en oeuvre d’un système entièrement tourné vers les intérêts du patient et de la santé publique »
Ce rapport est très intéressant sur l'historique de cette spécialité pharmaceutique et ses dérivés et sur les instances de sécurité sanitaire (commission de transparence, d'AMM, nationale et technique de pharmacovigilance et l'Agence du médicament devenue Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé)