Aucun parti pris ne sera indiqué dans cet article. Il est juste question ici d'évoquer les points abordant la santé dans le rapport de la commission pour la libération de la croissance française.
LA SANTÉ, UNE CHANCE POUR LA CROISSANCE
Les dépenses de santé sont trop souvent présentées comme une charge dont le poids croissant menacerait la croissance de l’économie.
Dès lors, il faudrait, selon cette thèse, maîtriser ces dépenses, rationaliser l’offre de soins, chasser les gaspillages, engager des politiques volontaristes de restriction. Le Danemark, l’Irlande et la Finlande s’y sont récemment essayés, sans réel succès.
En fait, tout au contraire, le secteur de la santé ne constitue pas une charge mais un moteur de croissance : la santé de la population, l’allongement de l’espérance de vie, la réduction de la douleur, sont des progrès en soi. L’industrie de santé est un facteur de croissance de l’économie, représentant près de 11 % du PIB et employant près de 2 millions de personnes (soit 9 % de la population active). Son chiffre d’affaires a doublé en 40 ans et augmente plus vite que le revenu disponible. Les emplois dans la santé ont augmenté depuis 20 ans 6 fois plus vite que l’emploi total.
Le chiffre d’affaires de l’économie de la santé continuera de croître de plus en plus vite : les progrès des techniques médicales qui s’annoncent, grâce aux biotechnologies, aux thérapies géniques, aux neurosciences et aux nanotechnologies, préfigurent des pratiques de plus en plus intensives en capital et de plus en plus individualisées.
L’allongement de l’espérance de vie fait croître la demande de soins, au cours de la vie et en fin de vie. En particulier, les Affections longue durée (ALD) qui représentent aujourd’hui 60 % des dépenses de santé augmenteront sous l’effet du vieillissement de la population.
Au total, la demande de soins :
• croîtra plus vite que le PIB pour atteindre le niveau actuel de la Suisse et des États-Unis : environ 15 % du PIB et 20 % du PIB en 2030 ;
• aura un effet d’entraînement sur les autres secteurs productifs.
Pour capter ce formidable potentiel de croissance, notre pays dispose d’indéniables atouts mais doit faire face à certaines difficultés.
Le système de santé français est régulièrement placé n° 1 dans les classements mondiaux1 pour la qualité des soins
Il est donc capital d’encourager les Français à adopter des modes de vie plus responsables et plus sains. C’est déjà un succès avec le tabac, une des deux premières causes de mortalité prématurée (dont le coût global supporté par la société est chiffré à 37 Md €2) et dont la consommation a pu être divisée par deux grâce à un ensemble d’actions de prévention.
La prévention reste pourtant actuellement une priorité secondaire dans le système français : la France n’y investit que 3 % de ses achats de santé (soit 92 € par habitant pour un total de dépenses de 198 Md €)
DÉCISION 66 _ Développer massivement la prévention.
• Doubler progressivement le financement de la prévention
• Lancer des programmes de prévention à l’école, notamment pour la prévention bucco-dentaire et l’alimentation. • Faire lancer par les médecins traitants et infirmières à domicile des campagnes de promotion des meilleurs modes de vie (pratique sportive, régime alimentaire, tabagisme, consommation d’alcool et de drogues), ciblées sur les groupes à risque.
OBJECTIF Améliorer la qualité de l’offre médicale
DÉCISION 71 _ Améliorer la formation des médecins.
Alors que la qualité de l’enseignement et de la formation professionnelle française est redevenue excellente, et après 20 ans de sous-recrutement de médecins, le pays va manquer de médecins pendant les 15 prochaines années.
• Donner aux futures Agences régionales de santé la responsabilité de fixer la répartition des postes à l’examen national classant, en assurant une meilleure répartition entre médecine générale et spécialités, dans l’objectif d’atteindre un ratio généralistes/ spécialistes de l’ordre de 80/20.
• Développer des aides incitatives aux médecins pour leur installation, en vue d’orienter les étudiants vers les disciplines déficitaires.
• Améliorer la formation des médecins en matière de nutrition et de mode de vie.
• Faire de la première année de médecine un tronc commun avec les autres professions sanitaires (pharmaciens, kinés, en plus des professions pour lesquelles c’est déjà le cas).
• Compléter une partie de la formation par des professeurs extérieurs au système hospitalier (gestion, relations humaines…).
• Instituer la formation par Internet par les meilleurs spécialistes.
DÉCISION 72_Rationaliser les actes médicaux et développer l’Hospitalisation à domicile (HAD).
Sur les 28 millions de journées d’hospitalisation en soins de suite et de réadaptation, 64 % relèvent d’activités en Hospitalisation à domicile. L’HAD répond parfois beaucoup mieux à la situation de nombreux malades ; son coût moyen journalier de fonctionnement est de 40 % inférieur à celui de l’accueil en structure hospitalière.
Parvenir à cette réorientation suppose de :
• Déléguer certains actes de prévention et de soin à des « professions paramédicales » dont les niveaux de qualification et d’exigence se sont accrus considérablement : les infirmières (ex. : vaccins), les pharmaciens (ex. : renouvellement des prescriptions de médicaments) ; les optométristes ; les hygiénistes dentaires.
• Développer, pour les affections de longue durée, une interaction forte (téléphone, mail, courrier, SMS, etc.) entre l’assureur principal et le patient pour lui permettre de bénéficier d’un suivi de l’ensemble des composantes et facteurs d’amélioration de son état de santé (hygiène de vie, alimentation, etc.).
• Encourager le développement de technologies permettant le maintien ou le retour à domicile : plates-formes d’accompagnement mobile, assistants robotiques et équipements domotiques, logiciels spécifiques, etc.
• Valoriser le métier d’infirmier(e), d’aide-soignant(e) en augmentant les actes qu’ils sont autorisés à accomplir.
Ceci générera une économie de 700 millions d’euros par an
OBJECTIF Libérer la croissance de l’offre pour de nouveaux biens et services de santé
DÉCISION 74 _ Satisfaire les nouveaux marchés de la dépendance.
Le nombre de gens en situation de dépendance devrait augmenter de plus de 25 % d’ici 2020 pour atteindre 1,1 million ; cette dépendance sera de moins en moins forte, grâce à la prévention, aux progrès de la médecine et à la robotique. Parallèlement, le coût des services de dépendance augmentera, portant la part du marché de la dépendance dans le PIB, de 1 % actuellement, à au moins 1,25 % dès 2020. Elle est actuellement financée par la branche de l’assurance maladie (39 %), les départements (18 % via l’Allocation personnalisée d’autonomie), et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (10 %). Les 33 % restants sont à la charge des familles.
• Créer une nouvelle branche pour financer la dépendance, en toute transparence pour le contribuable.
• Relever le plafond des déductions fiscales sur les services rendus à des personnes dépendantes, dans le cas où leur état de santé nécessite une présence à domicile 24 heures sur 24.
• Développer les produits d’assurance privée et de mutuelle.
• Adapter l’urbanisme, le parc immobilier, les aménagements touristiques et le système de transport public au 4e âge :
RÉFORMER LES PROFESSIONS AUJOURD’HUI RÉGLEMENTÉES
Le champ des professions réglementées recouvre des situations très diverses, comme en atteste la définition large qui en est donnée dans le cadre du droit européen. Certains commerces spécialisés, une grande partie des activités de santé, la plupart des métiers du droit forment un ensemble très disparate qu’il convient d’appréhender en distinguant les spécificités de chaque situation. Si une réglementation reste la plupart du temps justifiée pour garantir la compétence des professionnels, tout particulièrement dans les secteurs de la santé et du droit, les mécanismes de réglementation économique de ces
Les pharmaciens (22 500 officines, avec 28 000 pharmaciens libéraux).
Les autorisations d’ouverture de pharmacie sont délivrées par les préfets en fonction de l’évolution de la population. Depuis 1999, aucune autorisation ne peut être accordée dans les communes où les quotas de densité sont atteints. De plus, la liste des produits dont la vente est exclusivement réservée aux pharmaciens est beaucoup plus large en France que dans la plupart des pays de l’Union européenne, alors même que les prix des produits vendus aussi en dehors des pharmacies sont inférieurs de 20 à 30 %. Enfin, la prise de participation au capital des officines est limitée, ce qui a d’ailleurs valu à la France une mise en demeure de la Commission européenne de changer sa législation.
DÉCISION 212_ Ouvrir les conditions d’exercice des activités de pharmacie.
• Supprimer le numerus clausus, en créant un mécanisme incitatif pour que la carte des officines dans les territoires enclavés puisse satisfaire les impératifs de santé publique.
• Limiter le monopole pharmaceutique aux seuls médicaments prescrits sur ordonnance, sur le modèle italien, sans
DÉCISION 224 _ Supprimer, dans la Constitution, la distinction entre PLFSS (projet de loi de financement de la Sécurité sociale) et PLF (projet de loi de finances), afin que l’ensemble fasse l’objet d’un examen conjoint et soit soumis aux mêmes votes.
DÉCISION 270 _ Renforcer l’action du comité d’alerte de l’assurance maladie, qui a fait la preuve de son efficacité, en fixant ses réunions à dates fixes et en confirmant l’indépendance de ses membres, par exemple en associant le Parlement à leur nomination.
DÉCISION 271 _ Clarifier le rôle respectif des administrateurs (gestion) et des partenaires sociaux (orientations stratégiques, conseils de surveillance) dans les organes de direction des caisses de sécurité sociale.
DÉCISION 272 _ Généraliser les Agences régionales de santé (ARS).
La première expérimentation est prévue en 2008, par la fusion des agences existantes (Agences régionales de l’hospitalisation, Direction départementale des affaires sanitaires et sociales, Direction régionale des affaires sanitaires et sociales, Unions régionales des caisses d’assurance maladie) ; elles seront chargées de la connaissance et du suivi de l’état et des besoins sanitaires locaux, de la veille et de la gestion des crises sanitaires ; de la planification et de l’organisation de l’offre de soins. Cela permettra de fluidifier les parcours de soins (articulation médecine de ville, maisons de santé, services d’urgence hospitalière), de rationaliser les investissements et les moyens (synergies,
regroupements, fusion ou mutualisation des moyens entre structures publiques et privées) et de mettre en cohérence les politiques de santé conduites sur le territoire pour éviter les redondances, responsabiliser clairement les acteurs et régler au bon niveau les éventuels conflits de compétences ou d’ambitions concurrentes.
DÉCISION 273 _ Organiser une gestion régionale de la carte sanitaire.
La coordination et la planification de l’offre qui fait intervenir des acteurs et des structures aux statuts et intérêts très divers (assurance maladie, hôpitaux publics et privés, médecine de ville libérale, secteur médico-social, secteur « naissant » de la dépendance, collectivités locales) ne peuvent valablement s’exercer qu’au niveau régional. L’échelon régional est l’échelon pertinent d’organisation et de gestion de l’offre et de la demande de soins, de la mise en cohérence des différents acteurs et structures publics et privés concourant à l’offre de soins (médecine de ville, hôpitaux, CHU et CHR, centres de soins, structures médico-sociales) et de la nécessité de simplifier les parcours de soins des patients.
DÉCISION 274 _ Mesurer l’efficience et la qualité du système de soins.
La mise en place d’un système transparent et accessible permettant la comparaison des différentes structures de soins sur une base objective doit constituer un outil efficace d’aide au choix et à la décision des patients et d’appui au pilotage de ces structures. Ce système comportera, sur le modèle norvégien, des indicateurs de coûts et de résultats (taux de mortalité, taux de maladies nosocomiales, temps d’attente moyen aux urgences, taux de reprise suite à opérations).
OBJECTIF Rationaliser la gouvernance des hôpitaux
D’un côté, les grands centres hospitaliers universitaires ne parviennent pas à se restructurer (28 sur 29 ont présenté en 2007 un budget déficitaire qui pourrait représenter une perte cumulée de plus de 1 Md €). De l’autre, l’inévitable restructuration et le regroupement des plateaux des petits centres hospitaliers sont souvent différés par des considérations locales. Dans les deux cas, les établissements publics ressentent de plus en plus fortement la concurrence des cliniques privées qui gagnent en parts de marché et s’engagent dans des politiques de fusion-rapprochement pour maintenir leur compétitivité.
DÉCISION 275 _ Permettre aux hôpitaux publics d’opter pour un statut équivalent à celui des hôpitaux privés à but non lucratif.
Cette évolution doit être accompagnée, pour le personnel, d’une garantie de reprise et d’équivalence de carrière au sein de la fonction publique hospitalière. Ce statut de plus grande autonomie permettrait notamment de gérer le personnel hospitalier dans le cadre de conventions collectives (hors personnel souhaitant être maintenu dans la fonction publique hospitalière) plus souples et 300 décisions pour changer la Francemotivantes et de faire appel à des règles et procédures d’achat moins contraignantes que le code des marchés publics.
DÉCISION 276 _ Ouvrir le recrutement des directeurs des hôpitaux publics à des cadres, entrepreneurs ou médecins des secteurs publics et privés.
DÉCISION 277 _ Modifier la formation de l’École nationale de la santé publique (ENSP) exagérément axée sur des problématiques juridiques et inadaptée aux exigences managériales de modernisation des structures hospitalières.
DÉCISION 278 _ Accroître la responsabilité des directeurs d’hôpitaux et leur donner les moyens d’exercer cette responsabilité.
Pour cela, le conseil d’administration pourra être transformé en conseil de surveillance, complété par un directoire, présidé par le directeur de l’hôpital. Une telle réforme permettra de déléguer considérablement la gestion de l’hôpital à son directeur.
DÉCISION FONDAMENTALE 2
_ Constituer 10 grands pôles d’enseignement supérieur et de recherche autour de 10 campus, réels et virtuels, fixant les conditions d’excellence de l’ensemble du système de formation supérieur et de recherche. La dépense d’éducation représente aujourd’hui 9 370 € par étudiant
DÉCISION 7 _ Refonder l’information sur l’orientation sur les carrières et prendre davantage en compte les aptitudes non académiques.
Aujourd’hui, le choix des études se fait largement « par défaut » : les meilleurs élèves vont en section scientifique puis en classes préparatoires
Les universités françaises reçoivent 8 700 € par étudiant en moyenne contre 36 500 € aux États-Unis. Ainsi, seules 3 universités françaises sur 86 figurent parmi les cinquante premières dans le classement de Shanghai, et seulement 15 sont dans les 100 premières. Aucune université française ne figure parmi les 100 premières mondiales en médecine et en pharmacie
DÉCISION 11 _ Donner progressivement aux étudiants de licence à l’université un encadrement équivalent à celui des élèves de classes préparatoires aux grandes écoles.
Un accompagnement individuel de l’étudiant durant ses premières années d’études supérieures aidera à l’égalité de traitement entre les élèves de licence et ceux des classes préparatoires aux grandes écoles.
À cette fin, il conviendra de généraliser le système de tutorat déjà évoqué dans le Schéma national de l’orientation et de l’insertion professionnelle. Les universités pourront valoriser l’engagement de ces tuteurs, étudiants plus âgés, soit par sa prise en compte dans leur cursus sous forme de crédits ECTS (European Credit Transfer System), soit par une rétribution monétaire.